Les offres publiques, Dont Les offres publiques d’achat est un élément important, sont apparues au niveau mondial dans les années 60. Elles se sont fortement développées dans les années 80-90 avec les grandes vagues de fusions-acquisitions.
L’objet de notre article est de présenter l’état de la connaissance relative aux offres publiques d’achat au Maroc. Pour ce faire, nous présenterons dans un premier point les offres publiques d’une manière général, son contexte d’apparition, sa définition et ses typologies. Puis dans un deuxième point, le cadre légal régissant les OPA, ainsi que ses motivations. Ensuite dans un troisième point, l’impact d’une OPA sur les différents acteurs, et les stratégies anti-OPA.
Table de matières
De l’offre publique à l’offre publique d’achat : contexte, définition et typologies
Le marché financier est le marché où se négocient des offres publiques. Dans ce point nous vous présenterons en premier lieu le contexte d’apparition des O.P, puis en deuxième lieu sa définition et enfin ses typologies.
Contexte d’apparition des offres publiques
Le régime légal des offres publiques a été introduit au Maroc en 2004 par la mise en place de la loi n° 26-03 relative aux offres publiques sur le marché boursier, promulguée par Dahir n° 1-04-21. Ladite loi fixe le cadre général et définit l’ordonnancement des étapes que doivent suivre les offres publiques, sur fond de formalisme assez précis.
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Le régime des offres publiques au Maroc repose sur des principes directeurs globalement répandus dans la pratique internationale, notamment dans les pays disposant d’un cadre spécifique aux offres publiques. Les plus importants sont incontestablement le traitement égalitaire des actionnaires et la transparence du marché boursier que toute offre publique doit garantir.
Définition de l’offre publique
On entend par offre publique la procédure qui permet à une personne physique ou morale, agissant seule ou de concert, dénommée l’initiateur, de faire connaître publiquement qu’elle se propose d’acquérir, d’échanger ou de vendre tout ou partie des titres donnant accès au capital social ou aux droits de vote d’une société dont les titres sont inscrits à la cote.
Cette offre publique peut être amicale lorsque l’offre est effectuée en accord avec le conseil d’administration ou le conseil de surveillance de la société cible, comme peut être hostile dans les cas contraires.
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Cette définition générique apporte les principaux éléments de qualification d’une offre publique, à travers l’identification de ses composantes essentielles :
- L’initiateur : il désigne la personne physique ou morale qui déclenche une offre publique en déclarant publiquement qu’elle se propose d’acquérir ou de céder les titres d’une société cotée, en agissant seule ou de concert avec d’autres personnes. L’initiateur annonce, à cet effet, ses intentions, les objectifs de l’opération ainsi que les engagements pris pour sa réalisation. Lorsqu’il agit de concert avec d’autres personnes, l’ensemble est réputé solidaire. L’action de concert se vérifie lorsque des personnes, physiques ou morales, coopèrent sur la base d’un accord, formel ou tacite, oral ou écrit, en vue d’acquérir ou de vendre des droits de vote d’une société, d’exercer des droits de vote dans le cadre d’une politique commune ou encore d’agir en vue de faire aboutir ou échouer une offre publique.
- La société visée : les offres publiques visent uniquement les émetteurs dont les titres sont cotés en bourse.
- Les titres concernés par l’offre : l’offre doit viser tout ou partie des titres donnant accès au capital social ou aux droits de vote de la société visée. Le terme « titre » doit se comprendre comme comprenant les actions, ordinaires ou de préférence, et toutes valeurs mobilières donnant accès au capital ou aux droits de vote.
- La publicité : l’offre est annoncée publiquement, et ses caractéristiques détaillées dans un document d’information prévu à cet effet. Globalement le document d’information relatif aux offres publiques est structuré de manière à offrir tous les éléments nécessaires d’appréciation de l’opération au travers, notamment, les informations sur les initiateurs, la société visée, les objectifs de l’opération et les éléments d’appréciation du prix proposé. Pour être valide, le document d’information doit être visé par le CDVM.
Les offres publiques peuvent être de plusieurs types qu’on énumère dans le point suivant.
Typologies des offres publiques
Il existe généralement trois types d’offres publiques, les offres publiques d’achat (OPA), les offres publiques de retrait (OPR) et les offres publiques de vente (OPV) qu’on les ajoutes une quatrième c’est l’offre publique mixte.
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- L’offre publique de vente
L’offre publique de vente (OPV) qui est une offre publique faite par des actionnaires à tous les épargnants qui le souhaitent, de leur vendre des actions d’une société selon des conditions précises de quantité et de prix. L’opération une fois conclue est généralement suivie de l’introduction en Bourse des dites actions.
- L’offre publique de retrait
l’offre publique de retrait est la procédure qui permet aux actionnaires détenant la majorité des droits de vote d’une société cotée de faire connaître publiquement qu’elles se proposent de racheter les titres cotés de ladite société, afin de permettre aux actionnaires minoritaires de se retirer du capital social.
- L’offre publique d’échange
l’offre publique d’échange est la procédure qui permet à une personne physique ou morale, agissant seule ou de concert, dénommée l’initiateur, de faire connaître publiquement qu’elle se propose d’acquérir, par échange de titres, tout ou partie des titres donnant accès au capital social ou aux droits de vote d’une société dont les titres sont inscrits à la cote.
- L’offre publique d’achat
Une offre publique d’achat dite OPA est la procédure qui permet à une personne physique ou morale, agissant seule ou de concert, de faire connaître publiquement qu’elle se propose, d’acquérir, contre rémunération en numéraires, les titres donnant accès au capital ou aux droits de vote de ladite société dont les titres sont cotés en Bourse.
NB : Donc la différence entre l’OPA et l’OPV, est que l’initiateur lance la première pour acheter les actions de la société visée, alors qu’il déclenche la deuxième pour vendre ses actions.
- L’offre publique mixte :
C’est à dire comportant un règlement partiel en titres avec soulte en espèces, les règles applicables sont déterminées en fonction du caractère principal donné à l’offre par son initiateur, sous réserve de l’approbation du Conseil déontologique des valeurs mobilières
En somme, Les offres publiques sur les titres cotés sont des opérations assez courantes dans les marchés financiers les plus développés. Les plus connues sont les offres publiques d’achat, en raison notamment de leur nombre et leur forte médiatisation. Donc la suite de notre exposer sera concentre seulement sur les OPA.
Cadre légale des OPA et motivations des OPA
Les offres publiques d’achats sont régies par un ensemble de mesures spécifiques que nous vous présenterons dans un premier point. Et qui ont des intérêts énormes pour l’entreprise énumères dans un deuxième point.
Cadre légale des OPA
A travers ce point, nous essayerons de faire une distinction juridique des différentes formes d’offre publique d’achat et enfin on va présenter les procédures de lancement d’une offre publique d’achat.
a. Les formes d’offre publique d’achat
Il existe deux formes d’offre publique d’achat : OPA obligatoire, et OPA volontaire.
Quelle est la différence entre une offre publique volontaire et obligatoire?
Une offre publique est dite obligatoire quand son lancement est exigé par les textes légaux et réglementaires. C’est le cas quand l’initiateur et les personnes agissant de concert avec lui détiennent un certain pourcentage des droits de vote d’une société cotée ou lorsque l’initiateur décide de la radiation de la société visée de la cote.
Une offre publique est dite volontaire quand elle émane seulement et uniquement de la volonté de l’initiateur et des personnes agissant de concert avec lui.
- L’OPA obligatoire
– Quels sont les facteurs déclencheurs d’une offre publique obligatoire ?
Franchissement de seuil
Toute personne physique ou morale détenant, seul ou de concert, directement ou indirectement, 40% des droits de vote de la société cible est obligée dans les 3 jours ouvrables après le franchissement de seuil de déposer auprès du CDVM un projet d’offre publique d’achat, d’échange ou mixte (art 18 Loi n°26-03).
– Une dérogation au dépôt d’un projet d’offre publique d’achat obligatoire peut elle être accordée ? Dans quelles conditions ?
Le CDVM peut à la demande de l’initiateur octroyer une dérogation au dépôt d’un projet d’offre publique d’achat obligatoire lorsque le franchissement des 40% des droits de vote de la société visée ne remet pas en cause le contrôle de cette dernière existant préalablement audit franchissement, notamment en cas :
- de réduction du capital de la société concernée ;
- de transfert de propriété de titres entres sociétés appartenant à un même groupe de sociétés.
La demande doit être déposée auprès du CDVM dans les trois jours ouvrables suivant le franchissement de seuil précité. Elle doit comprendre les engagements de ladite personne vis-à-vis du CDVM de n’entreprendre aucune action visant à acquérir, directement ou indirectement, en agissant seule ou de concert, le contrôle de ladite société durant une période déterminée, ainsi que, le cas échéant, de mettre en œuvre un projet de redressement de la société concernée lorsqu’elle est en situation de difficulté financière.
Le CDVM examine la dérogation demandée, il publie sa décision dans un JAL dans le cas où il l’accorde et précise les motifs de la dérogation accordée.
- L’OPA volontaire
Toute personne physique ou morale, agissant seule ou de concert, qui souhaite faire connaître publiquement qu’elle veut acquérir des titres cotés en Bourse, peut, à sa propre initiative, procéder à une offre publique d’achat des dits titres. Dans ce cas, elle dépose son projet d’offre publique d’achat auprès du Conseil déontologique des valeurs mobilières.
b. Procédures de lancement d’une offre publique d’achat
La Procédure de lancement d’une offre publique d’achat s’articule autour de six étapes :
- Le dépôt d’un projet d’offre publique d’achat :
Le dépôt d’un projet d’offre publique est effectué par l’initiateur auprès du Conseil déontologique des valeurs mobilières. Ce projet doit comporter notamment les propositions et renseignements suivants :
– les objectifs et intentions de l’initiateur
– le nombre et la nature des titres de la société visée qu’il détient déjà, ou qu’il peut détenir à sa seule initiative ainsi que la date et les conditions auxquelles leur achat a été ou peut être réalisé
– le prix ou la parité d’échange, auxquels l’initiateur offre d’acquérir ou de céder les titres, les éléments qu’il a retenus pour les fixer et les conditions de règlement, de livraison ou d’échanges prévus
– le nombre de titres sur lequel porte le projet d’offre publique
– éventuellement, le pourcentage, exprimé en droits de vote, en deçà duquel l’initiateur se réserve la faculté de renoncer à son offre.
Dans le cas où le projet d’offre publique est déclaré recevable conformément aux dispositions de loi, la teneur et la réalisation des propositions faites dans le projet d’offre deviennent des engagements irrévocables de l’initiateur.
Le projet d’offre publique déposé au CDVM doit être accompagné de la ou des autorisations préalables d’autorités ou d’instances habilitées à autoriser l’opération envisagée, conformément aux dispositions légales ou réglementaires en vigueur. C’est le cas notamment lorsque la société visée est régie par des dispositions législatives propres (établissement de crédit, entreprise d’assurance et de réassurance) ou plus généralement lorsque l’offre risque d’enfreindre les dispositions de la loi n° 104-12 relative à la liberté des prix et de la concurrence, promulguée par le dahir n° 1-14-116 du 30 juin 2014. A défaut de la production des autorisations précitées, le projet d’offre publique est irrecevable
- Début de la période de l’offre
Dès le dépôt du projet d’offre publique le CDVM publie un avis de dépôt du projet d’offre publique dans un journal d’annonces légales relatant les principales dispositions dudit projet. La publication dudit avis marque le début de la période de l’offre.
Le CDVM transmet à l’administration les principales caractéristiques du projet d’offre publique, laquelle les apprécie au regard des intérêts économiques stratégiques nationaux. L’administration dispose de deux jours ouvrables à compter de ladite transmission pour décider le non recevabilité du projet au regard desdits intérêts. Au cas où l’administration décide le non recevabilité dans les conditions précisées ci-dessus, elle en informe immédiatement le CDVM. A défaut de faire connaître sa décision dans le délai de deux jours susmentionné, l’administration est censée ne pas avoir d’observation à formuler.
Dès le dépôt du projet d’offre publique, le CDVM demande à la société gestionnaire de la Bourse des Valeurs de suspendre la cotation des titres de la société visée par le projet d’offre. L’avis de suspension est publié par la société gestionnaire dans les conditions prévues dans son Règlement Général.
Le CDVM dispose d’un délai de 10 jours ouvrables, courant à compter de la publication, pour examiner la recevabilité du projet d’offre. Il est habilité à exiger de l’initiateur toutes justifications appropriées et à requérir toute information complémentaire nécessaire à son appréciation. La demande des justifications et informations précitées suspend le délai prévu au 1er alinéa ci-dessus.
Tout projet d’offre publique doit être accompagné du document d’information :
– Dans le cas où la société visée adhère aux objectifs et intentions de l’initiateur, le document d’information précité peut être établi conjointement par l’initiateur et la société visée.
– Dans le cas où la société visée n’adhère pas aux objectifs et intentions de l’initiateur, elle peut établir séparément et déposer auprès du CDVM son propre document d’information dans un délai maximum de 5 jours de bourse après le visa du document d’information de l’initiateur.
- Décision de la recevabilité de l’offre et vis du CDVM
Le CDVM dispose d’un délai maximum de 25 jours ouvrables pour viser le ou les documents d’information, courant à compter de la date de leur dépôt. Le CDVM peut cependant prolonger ce délai pour une période de 10 jours ouvrables, s’il estime que des justifications ou explications supplémentaires sont nécessaires. Au terme de ce délai, le CDVM accorde ou refuse son visa. Tout refus de visa doit être motivé.
- Publication dans un Journal d’annonces légales
L’initiateur et la société visée doivent, chacun en ce qui le concerne, publier les documents d’information dans un journal d’annonces légales dans un délai maximum de 5 jours ouvrables après l’obtention du visa.
Les personnes qui désirent présenter leurs titres à l’offre publique d’achat transmettent leurs ordres aux sociétés de bourse pendant la durée de l’offre.
- Ouverture de l’offre :
L’ouverture de l’offre intervient après la publication du document d’information. C’est le début de la durée de l’offre. Pendant la durée de l’offre publique, la société visée et l’initiateur doivent faire preuve d’une vigilance particulière dans leurs déclarations relatives à ladite offre. Ils doivent limiter strictement les informations qu’ils diffusent auprès du public aux termes et éléments contenus dans le ou les documents d’information. Ils ne doivent pas induire le public en erreur.
En outre, toute information relative à l’offre pendant sa durée, émise par la société visée ou l’initiateur, doit être transmise au CDVM avant sa publication ou sa diffusion
- Publication d’un avis de résultat / fin de la période de l’offre :
La Bourse de Casablanca centralise les ordres d’achat et communique les résultats au CDVM qui publie un avis de résultat dans un JAL.
Motivations des OPA
Les offres publiques d’achat en tant qu’outil d’ingénierie financière visent des intérêts de développement pour une société, ces intérêts peuvent être soient d’ordre économiques ou financiers
a. Les motivations économiques
- La recherche de synergies économiques
Elles ont pour principal objectif de renforcer la compétitivité de l’appareil productif. L’entreprise réalisant une opération de prise de contrôle en lançant une O.P.A. est motivée par trois différents types de synergies: les économies d’échelle, les économies d’intégration verticale et la combinaison de ressources complémentaires.
- les économies d’échelle
Une manière de diminuer les coûts de revient unitaires d’une entreprise est l’augmentation de sa taille et du volume de sa production. On considère généralement que lorsque le volume de production double, le coût de revient d’un produit baisse d’1/5.
L’acquisition d’une autre entreprise est donc un moyen particulièrement rapide d’utiliser les économies d’échelle, notamment en compressant les coûts de recherche, de gestion et de distribution. En augmentant les quantités traitées, l’entreprise dispose d’un pouvoir de négociation supérieur auprès de ses fournisseurs pour baisser les coûts d’approvisionnement
- les économies d’intégration verticale
L’achat d’un fournisseur ou d’un client peut permettre de bénéficier d’économies d’intégration lorsque le savoir‐faire nécessaire à une étape du processus total est maîtrisé et peut s’appliquer à un autre niveau pour accroître l’efficacité du processus global.
- la combinaison de ressources complémentaires
Souvent de petites entreprises sont reprises par des plus grandes. Beaucoup de ces prises de contrôle sont motivées par la combinaison de ressources complémentaires.
– S’adapter aux évolutions technologiques
Les phases d’évolution technologique sont généralement suivies par des périodes de rapprochement d’entreprises. Durant ces phases d’évolution technologique (Internet par exemple), les créations d’entreprises sont nombreuses, mais la réduction des perspectives de croissance, la difficile rentabilité des start-up entraîne un phénomène de concentration du secteur
Par ailleurs, le développement de technologies de pointe, dévoreuses de capitaux, les amènent à se rapprocher de grands groupe qui, de son côté, profitera du dynamisme de cette activité
– Recherche la taille critique
Les entreprises sont soumises aux rapides changements de taille de leurs marchés. Positionnées sur un marché national durant de nombreuses années, certaines entreprises doivent affrontées un contexte régional, voire quelques fois mondiales. S’adapter à ces changements d’échelle requiert des moyens tant matériels qu’humains, ce qui se traduit par des besoins de financement plus important. La concurrence accrue, face à des groupes déjà de tailles respectables, rends d’autant plus cruciale une croissance rapide : il faut alors atteindre la fameuse « taille critique ».
– Pour supprimer un concurrent
Une offre publique d’acquisition peut être un moyen efficace de réagir à la menace de concurrents puissants. Elle peut en effet, s’insérer dans une logique de protection ou de réaction à une tentative d’attaque et s’opérer dans un contexte de prévention ou au moment de l’agression
– Entraver les barrières à l’entrée
En période d’internationalisation ou de changement d’activité, une acquisition stratégique permet de contourner les barrières à l’entrée, tant au niveau de la notoriété que des compétences techniques
– Accroitre le pouvoir de domination et d’influence
Dans des secteurs à forte concentration, il est parfois difficile d’acquérir des parts de marche supplémentaires autrement que par voie d’acquisition. Les nouveaux entrants sont découragés par les stratégies de domination globale par les confits exercées dans le secteur, par les politiques de différenciation qui ont fide1ise les clients à certains produits ou encore par des investissements en R&D considérables qui seraient indispensables.
L’acquisition de parts de marche poussée à l’extrême peut déboucher sur l’obtention d’une position de monopole. L’acquéreur a alors la possibilité d’imposer ses prix
b. Les motivations financières
- Les synergies financières
Elles sont un complément des synergies économiques. La société initiatrice d’une offre publique d’achat espère par le biais de l’acquisition de la société cible réduire son risque de faillite ou bénéficier de sa capacité d’endettement. En effet, en devenant propriétaire de la cible, il lui est alors possible de contracter des emprunts en son nom pour financer ses investissements et ses projets. De plus, en s’endettant la société doit accroître la rentabilité financière c’est-à-dire la richesse créée aux actionnaires grâce à l’effet de levier financier.
En réalisant des investissements rentables, la société génère des flux de trésorerie économique positifs, ils servent à rembourser l’emprunt. Le montant du remboursement de la dette doit être inférieur aux flux dégagés, l’excédent étant versé aux actionnaires. L’endettement sera alors créateur de valeur pour ces derniers.
Ainsi, lancer une offre publique d’achat sur une société cible peu endettée permet de bénéficier du levier financier. De même, les capacités d’emprunt pourront être obtenues à de meilleures conditions.
- La restructuration de l’entreprise
La montée en puissance des marchés financiers depuis deux décennies joue un rôle important dans la restructuration des entreprises. Le passage d’un financement des entreprises par l’endettement à un financement par les marchés financiers s’est accompagné d’un transfert du pouvoir des banques vers les investisseurs. On parle alors de la gouvernance des actionnaires, ceux-ci exerce une pression sur les dirigeants afin que la société atteigne le plus rapidement possible la rentabilité tant désirée
– Si la rentabilité du titre est décevante, les actionnaires ont la possibilité de vendre leurs titres et faire baisser le cours de l’action, poussant à une restructuration ou à une prise de contrôle par OPA
– Si au contraire la rentabilité est satisfaisante, les dirigeants devront convaincre le marché du bien-fondé de leurs opérations de croissance externe : en effet, pourquoi utiliser des capitaux pour des acquisitions alors que la rentabilité est déjà acquise.
Les motivations regroupées ci-dessus ne constituent pas un répertoire exhaustif des justifications des OPA. Chaque opération est unique et peut avoir autres motifs stratégiques.
Impact sur les acteurs et stratégies anti- OPA
Les offres publiques ont un grand impact sur les différents acteurs. De ce fait, Les autorités boursières acceptent généralement certaines défenses dont l’objet est de se prémunir contre les offres publiques offensives.
Alors quel est l’impact des offres publiques sur les différents acteurs ?
Et quelles sont les différentes défenses et stratégies anti-OPA qui peuvent être mis en place?
Impact d’une OPA sur les différents acteurs
Trois types d’acteurs sont particulièrement concernés : les actionnaires, les salariés et les dirigeants.
- Les actionnaires :
Les actionnaires de la société cible, sont souvent les gagnants de ce type de procédure. Ils se voient offrir une chance de réaliser des plus-values intéressantes par rapport aux cours de Bourse de leurs actions.
Les actionnaires des sociétés cibles ont donc tendance à se réjouir des OPA, et cela d’autant plus que d’éventuelles contre-OPA.
Ils peuvent, en outre, faire échec à l’offre publique s’ils jugent le prix insuffisant.
- Les salariés :
Comme toute prise de contrôle, l’OPA peut être suivie d’une restructuration entrainant pour les salariés des risques de modifications des postes et des conditions de travail et éventuellement la fermeture d’un établissement.
Il s’agit là des conséquences d’une opération de concentration et de rationalisation qui ne sont pas spécifiques à l’offre publique d’achat mais répondent à des impératifs économiques.
- Les dirigeants :
L’attitude des dirigeants d’une société cible conduit à la classification a posteriori d’une OPA selon la définition « OPA amicale » ou « OPA hostile ».
Dans la pratique, il arrive que les dirigeants d’une société acheteuse puissent convaincre les dirigeants d’une société cible du bien fondé de leur démarche et qu’ils apportent par la même occasion un certain nombre de garanties personnelles aux dirigeants de la société cible.
Mais si les dirigeants ne sont pas convaincus, et estiment que l’offre publique peut être un facteur d’élimination pour eux, ils vont refuser et se prémunir contre l’offre qui sera hostile, en augmentant le prix des actions à un niveau élevé, et en mettant en place des défenses Anti-OPA.
Les stratégies de défense Anti-OPA
Différents types de mesures juridiques ou financières peuvent être mis en place avant ou pendant l’opération. Elles n’ont pas toujours pour effet de réaménager le capital, mais aussi elles modifient la répartition du pouvoir.
Les entreprises cibles contiennent plusieurs défenses qui sont prises soit avant toute offre (préventives), soit en cours de l’offre.
a. Les défenses préventives
Construire une défense solide suppose de mettre en place un nombre de mécanismes destinés à dissuader le lancement d’une OPA hostile ou, au moins, limiter les possibilités d’accès d’un potentiel acquéreur au capital social de la société cible.
A ces fins, la société peut mettre en place préventivement un certain nombre de stratégies défensives.
- Société en commandite par actions (SCA) :
La plus simple méthode pour se prémunir contre un changement de contrôle de l´entreprise est de séparer le pouvoir du capital. Seuls les commandités, dont les parts ne sont ni transmissibles ni cessibles, disposent d´un pouvoir de contrôle. Les commanditaires, dont les parts sont cessibles et transmissibles, ne disposent d´aucun pouvoir de contrôle.
Lorsque la SCA se transforme en SA, les associés commandités se font généralement verser les indemnités importantes en contrepartie de leur perte de contrôle.
Donc cette méthode reste une faible protection contre les tentatives d´OPA.
Toutefois, différentes mesures juridiques ou contractuelles permettent de les prémunir ou de mieux les combattre.
- L’actionnariat salarié :
L’actionnariat salarié constitue une stratégie de défense efficace contre les OPA, notamment parce que l’actionnaire salarié sera moins vulnérable face à une telle offre.
En effet, eu égard aux conséquences que peuvent avoir le succès d’une offre d’achat sur son emploi dans la société cible, le salarié actionnaire sera davantage préoccupé par le maintien de son emploi que par l’attractivité d’une offre d’achat de ses titres. A titre d’illustration, l’actionnariat fortement développé au sein d’Eiffage a largement contribué à l’échec de la tentative d’acquisition initiée par Sacyr en 2007.
- la différenciation des pouvoirs entre actionnaires:
La différenciation des pouvoirs entre actionnaires se caractérise par le fait que les plus fidèles d’entre eux disposent de droits de vote multiples. Le droit de vote double favorise la concentration du pouvoir entre les mains d’actionnaires coalisés. C’est une technique utile pour tenter de se protéger contre toute tentative de prise de contrôle.
b. Les défenses en cours d’offre
A la différence des défenses préventives, les possibilités de réaction de la société cible en cours d’offre sont plus limitées et plus encadrées, notamment parce qu’il est sans équivoque qu’elles visent à faire échouer l’OPA hostile.
- L’émission de titres donnant accès au capital :
En réaction à une offre hostile, la société cible pourrait envisager de procéder à une augmentation de capital par émission d’actions ou de valeurs mobilières donnant accès au capital (obligations convertibles, obligations à bons de souscription autonome) réservée à des tiers « amis ».
La société pourrait également avoir procéder à cette émission, avant tout offre, au profit d’une société constituée de plusieurs alliés, conservant les titres et n’exerçant la conversion ou la souscription qu’au moment du lancement d’une OPA hostile. Le capital de la société se trouve ainsi augmenté et un allié important apparaît, diluant par la même occasion l’initiateur de l’offre.
- Le chevalier blanc :
Confrontée à une offre inamicale, la société attaquée peut faire appel à un chevalier blanc afin qu’il procède à une OPA concurrente. Le surenchérissement de l’offre initiale par le sauveur de l’entreprise entraîne de surcroît la valorisation des actions de la société cible, et permet ainsi aux actionnaires d’obtenir une meilleure contrepartie en cas d’apport de leurs actions. L’efficacité de cette défense a fait ses preuves à maintes reprises, notamment lors de la tentative d’OPA initiée par Generali sur Allianz en 1997, laquelle a fait appel au chevalier blanc AGF, contrant ainsi l’offre initiale.
Cette stratégie défensive semble a priori être bénéfique tant pour les actionnaires (valorisation de leurs actions) que pour la société. Ce propos doit néanmoins être nuancé puisqu’en cas de succès du chevalier blanc, le contrôle de la société cible changera. La défense n’est donc pas absolue.
- La vente d’actifs convoités (« Sale of crown jewels assets »):
Face à une offre d’achat inamicale, la société cible peut décider de céder un actif ou une branche d’activité stratégique à une société tierce (généralement un allié), rendant ainsi l’offre initiale sans intérêt pour l’initiateur. Ce dernier se retrouve donc avec une coquille vide.
Cette défense est connue aux Etats-Unis sous le nom de « crown jewels assets » (« joyaux de la couronne »). Elle prend généralement la forme d’une vente du bien convoité à un allié de la société cible, laquelle est qualifiée de « crown jewel lock-up ». Bien que la cession d’un actif n’est pas un obstacle absolu à l’OPA hostile, elle créée au minimum des obstacles supplémentaires pour la société attaquante, notamment parce qu’elle procure à la cible des liquidités afin de mettre en œuvre d’autres mesures défensives telles qu’un rachat d’actions ou un versement de dividendes extraordinaires.
Cette mesure défensive peut également prendre la forme d’une liquidation partielle ou totale des actifs sociaux. La liquidation partielle d’actifs résulte de la vente par la société cible d’une partie de ses actifs, suivie d’une distribution du produit de la vente à ses actionnaires.
De surcroît, si elle estime que sa valeur liquidative est supérieure à celle qui résulte de l’offre hostile, la société peut procéder à une liquidation totale de ses actifs. Mais cette dernière solution est a priori quasiment impossible à mettre en œuvre compte tenu du temps nécessaire à sa réalisation, surtout si elle est décidée en réaction à l’OPA.
- La défense « Pacman »:
La défense « Pacman » consiste à déstabiliser l’assaillant en inversant le scénario de l’offre hostile. Afin de se défendre, la société cible va alors adopter une attitude offensive en lançant à son tour une offre sur l’initiateur de l’OPA. S’analysant comme une contre-offre, elle doit répondre aux mêmes conditions que l’offre initiale, et se voit également appliquer la même procédure.
Cette stratégie défensive, originaire des Etats-Unis, est rarement utilisée par les sociétés, notamment par qu’elle suppose que la société dispose d’important capitaux afin de financer à la fois la contre-offre et les autres mécanismes de défense susceptibles de faire échouer l’offre initiale. Cette contre-offre conduira généralement au retrait de l’offre initiale, ou au moins, à contraindre le raider à surenchérir son offre.
La défense « Pacman » a pour la première fois été utilisée par NLT Corp. contre American General en 1982, mais elle a abouti sur une offre amicale.
- Offre publique de rachat d´actions (OPRA) :
Les rachats par la société de ses propres actions constituent une stratégie de défense anti OPA. Ces mécanismes permettent d’atteindre deux objectifs.
D’une part, une augmentation du cours de l’action, ou relution, suit mécaniquement un rachat, de là une plus grande cherté de la cible. D’autre part, dès lors que les actionnaires de référence ne vendent pas leurs actions, leur influence s’accroît au sein de la société.
Le mécanisme de l’OPRA est le suivant : la société lance une offre de rachat sur son propre capital en proposant aux actionnaires un prix de rachat de leurs actions en numéraire et/ou des titres, supérieur à celui qui est proposé dans le cadre de l’OPA hostile.