L’économiste propose de traiter son domaine avec l’objectivité du scientifique. Il élabore des théories, collecte des faits et les analyse pour valider ou réfuter les théories.
La théorie constitue un exercice logique. Un enchaînement logique rigoureux conduit des hypothèses aux résultats. Si les hypothèses sont correctes alors les résultats se vérifient nécessairement. Mais la démarche scientifique ne signifie pas la définition d’hypothèses vraies.
Contrairement à l’état de sous-emploi où il est possible d’augmenter toutes les productions simultanément (passage de G à D par exemple) la raison en est évidemment que les ressources non utilisées en G sont mises en œuvre pour atteindre D.
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Ce qui caractérise une proposition scientifique c’est sa réfutabilité. La démarche scientifique en économie doit être fondée sur une logique théorique rigoureuse et conduire à des propositions qui puissent être confrontées aux faits.
Si les faits contredisent la proposition logiquement déduite de l’analyse théorique, alors le cadre d’hypothèses sous-jacent doit être révisé. Si les faits ne contredisent pas la proposition finale, alors on considère que le cadre d’hypothèses est performant et on le conserve, en attendant mieux.
Table de matières
Les étapes de la démarche scientifique en économie
Pour élaborer des lois, l’économiste suit une démarche scientifique qui passe par les étapes suivantes :
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- La phase d’observation des phénomènes économiques qui est fournie par l’économie descriptive et par la statistique.
- La phase d’abstraction qui consiste à simplifier la réalité en dissociant les aspects essentiels des aspects secondaires. L’abstraction est une opération qui consiste à isoler certains éléments essentiels en négligeant les autres.
- La phase déductive comprend :
- L’élaboration des hypothèses
- L’élaboration des lois par un raisonnement causal.
- La phase de vérification de la théorie qui consiste à confronter la théorie à la réalité pour tester sa pertinence. La vérification de la théorie peut être réalisée par l’utilisation des séries statistiques et des modèles mathématiques et/ou économétriques. Si la théorie est vérifiée par les faits, elle est acceptée sinon elle est rejetée, la cause se trouve très souvent dans les hypothèses qui sont mal formulées.
Cette démarche méthodologique est identique à celle de la recherche scientifique sauf en ce qui concerne l’expérimentation qui est difficile à y recourir pour les sciences sociales.
A titre d’illustration si nous nous intéressons à comprendre la réalité économique d’un pays en matière du rôle de l’Etat dans l’économie :
On commence par former des séries statistiques sur les dépenses et les recettes de l’Etat sur une longue période et puis on trace une évolution globale des dépenses et des recettes de l’Etat ainsi que du produit global.
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Ensuite on établira un lien possible entre le produit d’une part et les dépenses et les recettes d’autre part.
Pour comprendre la nature de ce lien, on avance une hypothèse : les taxes découragent l’investissement privé. Si l’on admet que les dépenses sont financées par les taxes et que l’investissement est le moteur de la croissance, on en déduit une loi : l’élargissement de la taille de l’Etat est nuisible à la croissance économique. De cette loi on parvient à élaborer une théorie libérale de croissance selon laquelle toute intervention de l’Etat est défavorable à la croissance.
La vérification de cette théorie repose sur la construction d’un modèle économétrique de croissance qui lie l’évolution du produit à celle des éléments qui contribuent à sa formation : le capital, le travail et les dépenses publiques Y = F (K, L, G).
Les tests statistiques nous permettent de mesurer la contribution de chaque facteur à la croissance ; si ces tests montrent que les dépenses publiques contribuent négativement à la croissance, on admet que la théorie est acceptable puisqu’elle permet de comprendre la nature de la croissance au pays.
Schématiquement on peut représenter les étapes de la démarche scientifique comme suit :
Il s’ensuit que toute théorie comporte les éléments suivants :
- Un ensemble de variables dans la phase d’observation des faits
- Une ou plusieurs hypothèses sur les liens unissant les variables
- Un ensemble de théories ou de lois que l’on veut vérifier au moyen d’un modèle.
Les variables
Les théories s’élaborent à partir des variables. Une variable, telle que le prix par exemple, est une grandeur pouvant prendre différentes valeurs possibles. Il existe plusieurs distinctions possibles entre les différentes variables :
Variables endogènes ou induites et variables exogènes ou autonomes (indépendantes) : Une variable endogène est générée par le modèle lui-même, c’est une variable expliquée dans le cadre de la théorie alors qu’une variable exogène a une origine extérieure au modèle, elle est déterminée par des éléments indépendants de la théorie, elle est introduite dans le modèle pour influer sur les variables endogènes.
Exemple : la production agricole, comme variable endogène est influencée par les conditions climatiques qui sont des variables exogènes. Alors que la production agricole n’affecte en rien les conditions climatiques.
Toutefois, certaines variables peuvent être à la fois exogènes et endogènes suivant le problème qu’on se pose. La pluviométrie, par exemple, est considérée par l’économiste comme une variable exogène alors qu’elle est considérée comme variable endogène du point de vue du météorologue.
Variables stocks ou variable d’état et variables flux ou variables de mouvement :
La variable flux comporte une dimension temporelle, elle est de tant à la date t.
Alors que la variable stock ne possède aucune dimension temporelle elle est instantanée ; elle est simplement de tant. Expl : la quantité d’eau dans baignoire est un stock, que l’on mesure à tout moment donné. La quantité d’eau qui coule du robinet est un flux, qui se mesure par unités de temps.
Les hypothèses
Dans l’élaboration des théories, la formulation des hypothèses constitue l’étape cruciale. Une hypothèse est un énoncé qui cherche à expliquer comment deux variables sont liées entre elles.
C’est à ce niveau qu’apparaît le premier effort d’abstraction qui se manifeste par l’élaboration des relations fonctionnelles fondamentales dans toute science. L’hypothèse en matière de gravitation relie la force d’attraction (G) entre deux corps de leur masse (M) à la distance (d)
qui les sépare ; G = G(M, d). En économie, l’offre (q) est fonction croissante du prix p ; q = q(p) ; plus le prix des pommes de terre augmente plus l’agriculteur est incité à produire plus de pomme de terre.
Les modèles
Les modèles économiques sont des théories qui synthétisent, souvent en termes mathématiques, les relations entre variables économiques. Ils aident à éviter les détails non pertinents et à centrer l’attention sur les liaisons économiques essentielles.
Un modèle économique est donc un énoncé explicite de définitions, d’hypothèses relatives au comportement et des suppositions que l’on utilise ; il est généralement construit pour vérifier une théorie.
Concrètement, la mise en jeu simultanée de plusieurs relations constitue un modèle. Ces modèles visent à simuler, de la façon la plus complète et la plus fidèle possible, le fonctionnement infiniment complexe des économies modernes.
Ils répondent en particulier aux préoccupations des pouvoirs publics, désireux de comprendre comment combiner au mieux les différents objectifs, le plus souvent contradictoires, qu’ils se fixent (réduire la hausse des prix, le chômage, le déficit extérieur, accroître la consommation, la production, …) et désireux de tester les effets des mesures économiques envisagées (variation des impôts et des cotisations sociales, variation du taux d’intérêt, dévaluation, …) ou d’événements prévisibles (hausse des prix des matières premières, …).
La démarche normative et la démarche positive
L’économie peut faire l’objet d’une approche positive ou d’une approche normative. Les deux approches peuvent se compléter : la prescription (analyse normative) peut s’appuyer sur la compréhension (analyse positive).
Mais il convient de ne pas mélanger les genres.
L’approche positive doit être évaluée sur un critère de scientificité (réfutabilité des propositions). Elle se fonde sur des faits observables. Son but est d’expliquer la réalité telle qu’elle est. Cette démarche fait appel aux informations disponibles.
Pour Ricardo : « une différence de coût de production, donc de prix des produits entre les pays, est à l’origine de l’échange international ».
L’approche normative est davantage appréciée sur la base de jugements de valeurs.
Elle se fonde sur une représentation subjective des faits. Son but est d’expliquer la réalité telle qu’elle devrait être. Dire que le libre échange est préférable au protectionnisme implique un jugement de valeur.
A titre d’illustration les questions du genre : Quelles politiques gouvernementales pouvant réduire le chômage ? ou Quelles politiques économiques pouvant maîtriser l’inflation ? sont des questions positives. Alors que les questions du genre : Devrait-on se préoccuper davantage du chômage plutôt que de l’inflation ? est une question normative.
L’économie positive peut mettre en œuvre une démarche scientifique, elle émet des hypothèses de comportement des agents économiques pour déduire des conséquences relatives à l’évolution des variables mesurables qui seront confrontées aux variables observables.
L’évolution des statistiques et des mathématiques a permis de tester empiriquement les hypothèses théoriques contemporaines.
Alors que l’économie normative se contente rarement d’une explication positive puisqu’elle traite le comportement humain. Elle apparaît comme la suite logique de la connaissance positive. Le scientifique ne produit de l’information que sur ce qui est, le débat sur ce que doit être dépend des objectifs et des priorités. Or ces objectifs relèvent des jugements de valeur et sont totalement subjectifs.